Le chœur des femmes – Martin Winckler

Note : 4 sur 5.

Jean Atwood, interne des hôpitaux et quatre fois major de promotion, vise un poste de chef de clinique en chirurgie gynécologique. Mais au lieu de lui attribuer le poste convoité, on l’envoie passer son dernier semestre d’internat dans un service de médecine consacré à la médecine des femmes – avortement, contraception, violences conjugales, maternité des adolescentes, accompagnement des cancers gynécologiques en phase terminale.
Le Docteur Atwood veut faire de la chirurgie, et non passer son temps à écouter des femmes parler d’elles-mêmes à longueur de journée. Ni travailler avec le controversé Docteur Karma. Mais la réalité n’est jamais ce que l’on anticipe, et la rencontre entre les deux médecins ne va pas se dérouler comme l’interne l’imagine.

Avis

Le chœur des femmes est dans ma PAL depuis une éternité et j’ai enfin pris le temps de l’en sortir!

On y suit le parcours du Docteur Jean Atwood, qui se destine à la chirurgie gynécologique, mais qui est obligé de faire son internat auprès du Docteur Franz Karma, praticien-chef de l’unité 77 dédié à la « Médecine de la femme ».

D’emblée, j’ai pris le Docteur Atwood en grippe tant sa vision de la médecine est particulière : il n’aime pas le contact humain, veut juste recoudre des femmes sans s’intéresser à ce qu’elles vivent ou ressentent. Sa vision des autres professions paramédicales est très étroite, limite misogyne, il a une opinion très élevée de lui-même, ne se remet pas en question, croit tout savoir et porte des jugements bourrés d’apriori. Bref, le médecin détestable auquel on espère n’avoir jamais affaire.

Son comportement est à l’opposé de l’attitude du Docteur Karma, à l’écoute des patientes, qui se sentent libres de tout lui dire, il les rassure et leur explique ce qui leur arrive, propose différentes solutions sans en imposer aucune. En fait, ce roman montre aussi l’engagement de certains médecins qui vivent leur profession comme une vocation, dévoués à leurs patients, qui ne comptent pas les heures, encadrent des internes, continuent de se former et alertent sur certaines pratiques.

Alors que je commençais à lire sans attente particulière, j’ai été étonnée de découvrir un roman totalement addictif, qui nous réserve en plus quelques surprises auxquelles on ne s’attend pas. Pourtant, les thématiques qu’il aborde sont particulièrement difficiles à lire puisque les violences gynécologiques et obstétricales sont au cœur de ce récit, tout comme le sujet de l’intersexualité, que je rencontre pour la première fois en littérature. Sur ces sujets, les témoignages des patientes sont révoltants tout comme le comportement de certains médecins (hommes ou femmes d’ailleurs).

Le chœur des femmes est d’une violence incroyable. Roman qui n’est malheureusement pas totalement une fiction, Martin Winckler étant médecin lui-même, il sait de quoi il parle.

Heureusement, au contact du Docteur Karma, Jean Atwood va s’humaniser et j’ai trouvé particulièrement intéressant le processus de « déprogrammation » du formatage universitaire qui s’opère au fil des rencontres avec les patientes et le personnel soignant.

670 pages pour la version de poche qui m’ont parfois parues un peu longues, lorsque les monologues s’égarent sur des sujets annexes. Mais globalement un excellent roman, dont les dernières pages sont particulièrement intenses, de quoi changer définitivement la vision du monde de Jean Atwood. Il est certain qu’après cette lecture on ne posera plus le même regard sur le corps médical.


Le chœur des femmes – Martin Winckler – P.O.L. Editeur – 2009

3 commentaires sur “Le chœur des femmes – Martin Winckler

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