
Je vous demande de vous mettre à notre place. Un instant. Rien qu’un instant. Votre enfant vient vous raconter l’humiliation, la persécution, le bannissement. C’est votre fils, votre fille, il a douze ans, elle en a huit ou quatorze. C’est la chair de votre chair, ce que vous avez de plus précieux au monde. C’est l’être que vous devez protéger, défendre, soutenir, aider à grandir. Et il vient vous avouer cela. Vous y êtes ? Vous la devinez, votre stupéfaction ? votre culpabilité ? votre douleur ? votre colère ? Ça vous envahit, pas vrai ? Ca vous submerge, ça vous dépasse, ça vous anéantit. Et ça, ce n’est que le début. Que les toutes premières minutes.
Avis
Ces paroles, ce sont celles du narrateur. Il est marié à Juliette et ont deux enfants Hugo et Enzo. Mais Hugo n’est plus là. Pourtant, il occupe toutes leurs pensées et est à l’origine d’une culpabilité que rien ne viendra jamais apaiser.
[…] ce n’est pas philosophique, la mort, ce n’est pas au-dessus de nous, ce n’est pas ailleurs, c’est très concret, et c’est là. C’est une chaise vide dans le petit matin tranquille, malgré le soleil qui éclabousse.
Ce roman est celui d’une descente aux enfers. Tout d’abord celle de Hugo, un adolescent gentil et sensible, souffre-douleur et victime d’un harcèlement d’une cruauté à peine imaginable. Ensuite, celle de ses parents, totalement démunis face à la situation.
La parole est donnée au père, qui raconte le choc de l’annonce, le froid glacial qui l’envahit, le monde qui s’écroule et le sentiment d’impuissance. Ce père qui n’aura de cesse de s’en vouloir, lui qui n’a rien vu venir, qui a minimisé les inquiétudes de sa femme, qui n’a pas pris conscience de l’ampleur du déchainement de violence qui touchait son fils, qui a tardé à agir et qui a finalement fait pire que mieux. Un père sonné, qui a échoué à protéger son enfant.
[…] Dans le miroir […] Je ne vois qu’un père qui a merdé.
Pourtant, les parents d’Hugo ont cherché de l’aide. Mais les portes se sont fermées les unes après les autres. Et j’ai été particulièrement choquée de constater l’immobilité du corps enseignant et de la justice, qui se déchargent de tout implication et préfèrent fermer les yeux.
Vous parler de mon fils est un magnifique roman que l’on doit à la très belle plume de Philippe Besson, qui démontre encore ici sa sensibilité et sa formidable capacité à exprimer les émotions, à se couler dans la peau du père.
Mais c’est aussi un roman difficile à lire, qui nous arrache quelques larmes tant les paroles de ce père sont émouvantes et justes. Dans une société où le harcèlement scolaire s’étend à toutes les sphères de la vie, un roman comme celui-ci est nécessaire pour alerter et réveiller les consciences. On connaît tous des Hugo mais quel soutien peut espérer un ado harcelé si les adultes qui sont sensés le protéger se dédouanent?
Une lecture dont on ne sort pas indemne et qui nous trotte dans la tête bien après l’avoir refermé.
Vous parler de mon fils – Philippe Besson – Editions Julliard – 2025
Un livre à mettre dans toutes les mains d’adultes, parents ou pas !
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Parfaitement!
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J’ai déjà souvent envisagé de le lire mais il faudra trouver le moment opportun.
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C’est le premier livre audio que j’ai écouté, un récit poignant.
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J’imagine qu’en livre audio, ça doit l’être encore plus!
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