Comme si nous étions des fantômes – Philip Gray

Note : 4 sur 5.

Amiens, 1919. Les champs de bataille de la Somme sont désormais silencieux. Ne restent que quelques hommes qui rassemblent les dépouilles pour tenter de les identifier. Amy, une jeune femme arrivée d’Angleterre, cherche à retrouver l’homme qu’elle aime, Edward, porté disparu. Dans la tranchée où celui-ci a été vu pour la dernière fois, treize cadavres ont été retrouvés. Il apparaît bien vite que leur mort n’a rien à voir avec les combats, ni avec l’armée allemande.

Avis

En 1916, Amy rencontre Edward. Unis par leur passion commune pour la musique, ils se fiancent juste avant que le jeune homme ne parte au front, en France.

En février 1919, après l’Armistice, Amy quitte son Angleterre natale et se rend à Boulogne à la recherche d’Edward, porté disparu. Mais à cette époque, il est mal vu qu’une femme se déplace seule, s’adresse à des militaires, pose des questions et veuille s’aventurer sur les champs de bataille à la recherche de son bien-aimé. Déboutée de partout, elle affronte les obstacles avec courage et cherche sans relâche des informations.

Pour cette jeune dame de la haute société, le choc est rude (boue, cadavres qui jonchent le sol, ossements à nus, prolifération de rats). Le personnage d’Amy dégage une grande force de caractère, téméraire et vaillante, elle est déterminée à découvrir ce que tous tentent de lui cacher. Pourtant, il s’en dégage aussi une certaine naïveté tant elle a confiance en la droiture de son fiancé, qu’elle connaît finalement très peu. Or, la guerre peut révéler le meilleur et le pire chez l’homme.

Habituellement, j’ai tendance à fuir les romans sur le thème de la guerre mais je dois avouer que je me suis laissée influencer par les bonnes critiques de ce roman. Et je ne suis pas déçue.

Comme si nous étions des fantômes est un roman très bien documenté et saisissant de réalisme. L’auteur nous immerge dans le quotidien des soldats et officiers, au cœur des tranchées, comme dans le saillant d’Ypres en Belgique. A la lecture de ce livre, on a l’impression d’entendre le bruit des explosions et des tirs, les cris des camarades blessés, de ressentir le froid et l’humidité, de voir le sang et la violence.

Surtout, Philip Gray montre les ravages de la guerre sur les jeunes gens (membres amputés, visages défigurés, folie, etc.). Mais aussi, et c’est ce qui m’a le plus frappé et dont je n’avais pas pris conscience avant, l’importante consommation de drogue sur le front: la cocaïne ou « pilule de marche forcée » pour se lancer dans les combats rapprochés sans peur et l’opium pour se calmer et dormir.

Et puis, une fois la guerre terminée, l’ingrate mission qui incombe aux Anglais, celle de récupérer les morts laissés à l’abandon sur le champ de bataille, de les identifier pour informer les familles et leur offrir une sépulture digne.

Un roman qui nous fait passer par différentes émotions, entre stupéfaction, tristesse et colère. J’ai ressenti beaucoup d’empathie pour ces hommes que l’on envoie à la mort, pour ces officiers conscients d’avoir la responsabilité de jeunes recrues à peine majeures et attentifs à leurs hommes.

Au fil de l’enquête d’Amy, alors que l’on croit comprendre comment les événements se sont déroulés, l’auteur ajoute une information qui redistribue les cartes, se jouant du lecteur et nous emmenant où bon lui semble.

Sans aucun doute, une lecture marquante de ce début d’année.


Comme si nous étions des fantômes – Philip Gray – Sonatines Editions – 2023

2 commentaires sur “Comme si nous étions des fantômes – Philip Gray

Ajouter un commentaire

Laisser un commentaire

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑