Profession romancier – Haruki Murakami

Note : 2.5 sur 5.

Dans un essai à la fois drôle, intelligent, passionnant, Haruki Murakami se raconte et porte un regard aussi rafraîchissant que sincère sur le métier de romancier.
Tout en explorant ses plus chères obsessions et en distillant des réflexions sur la littérature, la lecture et plus largement la société japonaise, l’auteur dévoile les coulisses de son quotidien, où s’imposent persévérance, patience et endurance.

Avis

Alors âgé de 70 ans, Haruki Murakami jette un regard dans le rétroviseur et prend du recul par rapport à son métier d’écrivain. Profession romancier est le résultat de cette réflexion, entre considérations philosophiques et détails concrets.

Logiquement, il revient sur ses débuts en littérature et, en particulier, sur son premier roman Ecoute le chant du vent écrit un peu par hasard, en six mois sur un coin de table de cuisine alors qu’il tenait un bar en journée. Ne sachant comment s’y prendre, il a finalement choisi de ne pas écrire dans sa langue maternelle, le japonais, mais en anglais, avec un nombre limité de mots correspondant à sa faible connaissance de la langue. Il a ensuite « traduit » ce texte particulièrement épuré en japonais. Une méthode de travail originale qu’il n’a pourtant plus utilisée par la suite.

Haruki Murakami estime qu’écrire un roman est à la portée de tous. Ce qui est difficile, par contre, c’est de continuer à écrire sans cesse, et d’en vivre.

Écrire un roman n’est pas très difficile. Écrire un roman magnifique n’est pas non plus si difficile. Je ne prétends pas que c’est simple, mais ce n’est pas non plus impossible. Ce qui est particulièrement ardu, en revanche, c’est d’écrire des romans encore et encore. Tout le monde n’en est pas capable. Comme je l’ai déjà dit, il faut disposer d’une capacité particulière, qui est certainement un peu différente du simple « talent ».
Bon, mais comment savoir si l’on possède cette aptitude ? Voici la réponse : plongez dans l’eau et voyez si vous nagez ou si vous coulez.
Bienvenue sur le ring !

Pourtant, malgré son succès au Japon et à l’étranger, l’auteur fait preuve de beaucoup d’humilité et de modestie dans ses propos. Il dit lui-même ne pas avoir de génie mais probablement certaines dispositions, puisqu’il arrive à vivre de ses écrits depuis 30 ans.

Il s’astreint à une hygiène de vie stricte : une heure de course ou de natation chaque jour et l’écriture de 10 pages par jour, ce qui lui prend 4 à 5 heures. Pendant les périodes d’écriture, il se consacre entièrement à son roman, refusant toute autre commande, avec détermination et régularité. Sans véritable plan, il laisse sa plume glisser puis passe par plusieurs phases de relecture et de correction avant d’être satisfait et d’enfin soumettre le manuscrit à son éditeur. Et, comme Stephen King, c’est son épouse qui est sa première lectrice.

On ne peut pas dire qu’il donne envie d’être écrivain, décrivant son activité principale comme solitaire et ennuyeuse, tant il passe du temps à fignoler la moindre phrase, alors que ses efforts passent totalement inaperçus pour le lecteur.

Parmi ses conseils aux futurs romanciers, citons:

  • lire beaucoup et de tout. Haruki Murakami est lui-même passionné par la littérature russe ou américaine du XIXe siècle;
  • s’entrainer à observer les lieux et les personnes;
  • surtout, éviter de poser des jugement hâtifs et sans nuance;
  • emmagasiner toutes les anecdotes qu’ils peuvent observer dans la vie quotidienne, pour pouvoir les réutiliser plus tard dans un roman.

On découvre également un homme passionné par la musique, et en particulier le jazz. Peu extraverti, il se tient à l’écart de la scène littéraire et des mondanités vis-à-vis desquelles il ne se sent pas à l’aise. Il semble, même s’il s’en défend, toujours aussi touché par les critiques négatives ou lorsque l’on remet en question l’originalité de son œuvre, sans cesse à la recherche de la reconnaissance du public et de ses pairs (l’auteur japonais a toute sa vie été boudé par les prix littéraires alors qu’il connaît un immense succès populaire).

Fidèle à la tradition littéraire japonaise, l’auteur évoque son état d’esprit et ses états d’âmes mais je trouve dommage qu’il se perde dans certaines considérations philosophiques sur plusieurs pages. Et même s’il s’adresse au lecteur et offre quelques anecdotes sympas, le tout donne un livre plutôt descriptif et lent, avec pas mal de longueurs.


Profession romancier – Haruki Murakami – Editions Belfond – 2019

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